Vous avez récemment appris que vous attendiez un enfant, vous ne réalisez pas trop et ne savez plus si c’est finalement une bonne ou une mauvaise nouvelle… Vous avez parfois un sentiment de malaise dans des situations pourtant anodines, ressentez de la tristesse, des angoisses, de la colères ou tout autre signe montrant que quelque chose ne va pas alors que vous vous seriez attendue à ressentir le bonheur le plus intense qu’il soit. Pas de panique, c’est normal !
Tout l’équilibre qui s’était établi en vous construisant autour de votre statut « d’enfant de » va se retrouver chamboulé en passant à celui de « parent de ». En effet, la grossesse s’accompagne d’une gestation psychique définie par Benoit Bayle comme « une période de crise identitaire et de maturation psychologique pour la femme qui devient mère » [1] , elle comprend trois phases[2] :
- la première consiste à confronter le souhait de grossesse à sa réalisation concrète[3] en intégrant ce que cela implique pour la femme pour sa vie quotidienne, sa relation à elle-même et avec son entourage. Plus la grossesse arrive rapidement après l’arrêt de la contraception moins cette phase a été démarrée en amont et plus rude peut-être le choc lors de sa découverte;
- la seconde est celle au cours de laquelle la femme enceinte commence à se représenter l’enfant et à y penser régulièrement en imaginant à quoi il pourrait ressembler. C’est souvent à cette période que les mouvements du fœtus sont ressentis par la future maman.
- La troisième correspond à la prise de conscience de l’individualité de l’enfant à naître et de la séparation physique qui va bientôt se produire. C’est là que l’enfant commence à parfois devenir gênant pour la maman en bougeant à des moments où elle veut se reposer ou encore en la limitant dans ses mouvements.
Ces étapes sont vécues différemment d’une femme à l’autre en fonction de leurs histoires affective, relationnelle et corporelle. Ainsi, pas d’inquiétude si vous ne ressentez pas la plénitude que vous auriez imaginée c’est normal et vous êtes loin d’être la seule dans ce cas. La bonne nouvelle c’est que vous avez 9 mois pour les traverser et que ça peut être l’occasion de vous attaquer à vos petits démons intérieurs pour vous sentir parfaitement bien à l’arrivée de bébé.
Concrètement, comment faire pour avancer et me sentir mieux?
Pour mettre de l’ordre dans vos idées, commencez par dresser la liste de ce qui vous chagrine avec cette grossesse. Soyez honnête avec vous-même et n’ayez pas honte des pensées qui vous traversent l’esprit même si elles vous semblent déplacées, injustes ou inhumaines envers votre entourage ou ce fœtus qui est en vous. En face de cela mettez toutes les raisons qui vous ont poussées à vouloir cet enfant.
Allez-y, prenez une petite dizaine de minutes à le faire, ça vous soulagera.
Alors, qu’avez-vous trouvé ? Il est probable que votre liste des inquiétudes soit plus longue que celle des côté positifs. Normal, il est plus facile de concevoir ce que vous allez perdre que ce que cet enfant va vous apporter, surtout si personne dans votre entourage très proche n’a encore d’enfant. Quelques thèmes assez communs peuvent-être la peur de l’accouchement, du changement de vie, du changement de relation avec votre conjoint ou vos amis, de l’envahissement possible des grands-parents, l’inquiétude de ne pas être à la hauteur, de ne finalement pas pouvoir concilier un enfant avec la vie que vous voulez mener ou avec votre travail, de ne pas pouvoir lui offrir tout ce que vous voudriez ou encore, la crainte de ne plus avoir de temps pour vous ou de perdre votre féminité…
Vous en avez certainement plein d’autres qui ne sont pas listés, si ça vous tente de les partagez, n’hésitez pas à écrire ici.
Poser sur le papier des inquiétudes qui taraudent aide généralement à se soulager, à relativiser et à se concentrer sur les solutions plutôt que de rester fixée sur les problèmes. Le temps fera son office et vous trouverez vos réponses au fur et à mesure que vous passez les étapes de la gestation psychique.
En parallèle, n’hésitez pas à lire du contenu, des livres ou des témoignages de personnes s’étant posé les mêmes questions que vous. Aussi, osez en parler autour de vous. Echanger avec votre conjoint peut être un bon moyen pour vous soulager, vous rapprocher encore plus, et pourquoi pas lui permettre d’exprimer aussi ses inquiétudes et d’avancer ensemble dans la « préparation du nid[4] ». Votre mère peut être une bonne interlocutrice pour trouver un écho à vos questions car il est probable qu’elle soit passée par des questionnements similaires à l’époque[5]. Le reste de votre entourage peut aussi vous aider en écoutant vos inquiétudes et en partageant leurs réflexions. Si vous ne vous sentez pas de partager cela avec vos proches, l’aide de professionnels formés aux questions liées à la parentalité peut être très bénéfique comme des doulas, psychologues, sophrologues ou hypnothérapeutes spécialisés en périnatalité/grossesse. Des associations sont aussi à votre écoute, vous trouverez beaucoup de numéros par région sur ce site.
Pour aller plus loin dans le travail sur vous
Si vous souhaitez profiter de votre grossesse pour faire le point sur vous, vous assurer que vous êtes bien dans vos baskets et travailler sur vos points durs avant l’arrivée du petit bout, prenez votre longue (ou pas…) liste d’inquiétudes et analysez-les une par une en vous posant la question « pourquoi ? » et à chaque réponse, creusez toujours un peu plus en vous redemandant « pourquoi ? ». Laissez venir les associations d’idées de façon spontanée, sans chercher à les contrôler. Cherchez aussi à identifier les émotions que vous ressentez pendant ce questionnement « qu’est-ce-que je ressens ?».
Si vous êtes vraiment honnête avec vous-même vous pourrez probablement mettre à jour des blessures[6] enfouies qui se réveillent avec l’annonce de la parentalité. Un parent absent dans votre enfance, de l’injustice, des traumatismes vécus que vous pouvez avoir peur de reproduire ou peut-être encore plein d’autres choses intimement liées à votre vécu.
Prenez maintenant le temps de digérer chaque point que vous avez soulevé, avoir identifié les nœuds est déjà énorme et représente un grand pas vers l’acceptation et la sérénité que vous ressentirez une fois votre travail terminé. Revenez-y régulièrement et cherchez des solutions à ces points durs et faites-vous aider par des professionnels si besoin (psychothérapeute, hypnothérapeute ou kinésiologue). Gardez en tête que ce travail peut-être long (plusieurs mois) donc faites preuve de patience. Ne soyez pas surprise de passer par des phases de déni et/ou de colère, de souffrance parfois aussi pour finir par l’acceptation[7]. Par certains aspects, faire face à ses blessures profondes peut s’apparenter à traverser les étapes d’un deuil.
Même avec une enfance heureuse certaines situations ont pu vous blesser et rester des cicatrices qui se rouvrent en situation extrême (et la parentalité à venir peut en être une). Plus vous serez sereine, débarrassée de tous les sacs à dos que vous pourriez porter depuis des années, meilleures seront les conditions dans lesquelles vous accueillerez puis élèverez votre enfant. En harmonie avec vous-même vous douterez moins de vos choix tout en sachant vous remettre en question si nécessaire et vous serez à coup sûr une très bonne maman et une femme épanouie !
[1] https://www.cerveauetpsycho.fr/sd/developpement-personnel/modifications-psychiques-durant-la-grossesse-1761.php et http://benoit.bayle1.free.fr/denigrossesse.pdf
[2] http://psychiatriinfirmiere.free.fr/infirmiere/formation/psychologie/cours/grossesse.htm et https://www.yapaka.be/content/les-%C3%A9tapes-psychiques-de-la-grossesse
[3] https://www.cairn.info/revue-dialogue-2002-3-page-42.htm
[4] Ma belle mère
[5] et [6] Les 5 blessures qui empêchent d’être soi-même – Lise Bourbeau.
[7] Reformulation des étapes de guérison proposée par Lise Bourbeau dans « les 5 blessures qui empêchent d’être soi-même »